La députée Louise Morel répond à nos questions sur la proposition de loi visant à encadrer l’influence commerciale
La proposition de loi visant à encadrer l’influence commerciale et lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux a été examinée par l’Assemblée nationale et le Sénat.
Alors que « la France est le seul pays au monde qui encadrera l’influence », la députée Louise Morel nous livre son éclairage des mesures phares du texte.
Jusqu’à ce jour, aucune réglementation spécifique et adaptée à certaines dérives du marché de l’influence n’existe alors même que des millions de personnes, dont des mineurs, y sont confrontés tous les jours sur les réseaux sociaux.
Louise Morel confirme que l’« on ne peut toutefois pas parler de vide juridique dans la mesure où les influenceurs sont d’ores et déjà soumis au droit de la publicité », mais ses dispositions sont rarement appliquées et respectées.
Selon la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF)[1], 6 influenceurs sur 10 ne respecteraient pas la réglementation sur la publicité et les droits des consommateurs.
Les influenceurs sont par exemple soumis à l’article 20 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 qui prescrit notamment l’identification par les consommateurs des publications à caractère commercial.
« Les réflexions autour de ce texte ont été difficiles car les influenceurs sont soumis au droit existant sans être directement rattachés à ses dispositions ».
Ce texte, issu d’un « travail parlementaire transpartisan » salué, vise à adapter les dispositions de lutte contre les pratiques commerciales trompeuses ou frauduleuses à cette « nouvelle activité entrepreneuriale et commerciale ».
Il cible notamment les multiples acteurs de l’influence (les influenceurs, agents d’influenceurs, annonceurs et plateformes qui hébergent leurs contenus) pour renforcer leur responsabilité.
Pour Louise Morel, il est nécessaire de renforcer leur responsabilité en cas d’atteinte aux droits de la propriété intellectuelle, et notamment en matière de contrefaçon, car “le code de la propriété intellectuelle œuvre également en faveur de la santé”.
Les députés du groupe Modem, et notamment le député Christophe BLANCHET, rapporteur de la mission de suivi de l’évaluation de la lutte contre la contrefaçon, ont élaboré des amendements avec le Comité national anti-contrefaçon (CNAC), dont il est le président, l’Union des fabricants (Unifab) et l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) pour que la responsabilité des influenceurs se fonde sur le code de la propriété intellectuelle.
En effet, “sur dix Français qui achètent de la contrefaçon, quatre n’en sont pas conscients, mais sont victimes d’une arnaque. Il est tout à fait possible qu’un influenceur ainsi dupé vende des produits de contrefaçon dangereux pour la santé publique, par exemple des crèmes pour le visage ou du parfum” expliquait-il en séance publique.
Le groupe Modem s’était également engagé à l’Assemblée nationale contre la publicité pour des boissons et produits alimentaires trop gras et trop sucrés mais l’interdiction faite aux mineurs de promouvoir de tels produits a été supprimée au Sénat.
Ces dispositions seront soumises à la Commission mixte paritaire courant mai en vue de l’adoption définitive du texte en juin.
[1]DGCCRF – 23 janvier 2023 – Communiqué de presse
Interview réalisé par Estelle Groff, Anne-Marie Pecoraro et Rodolphe Boissau