Décret « SMAD » : Consécration des obligations de financement pour les plateformes de vidéo à la demande
Alors que la profession et le public se préparent au Festival de Cannes atypique de juillet 2021, tout l’écosystème audiovisuel est en alerte au fur et à mesure des avancées des réformes.
Ce mercredi 23 juin, le décret n°2021-783 du 22 juin 2021 relatif aux services de médias audiovisuels à la demande (SMAD) a été publié au Journal Officiel. Le texte, entrant en vigueur le 1er juillet 2021, précise notamment les obligations des plates-formes dans le financement des œuvres françaises. Le CSA souligne « l’étape majeure que représente ce texte dans la modernisation du dispositif de financement de la création, dans un contexte de mutation profonde du secteur audiovisuel »[1].
Qu’est-ce qu’un service de médias audiovisuels à la demande (SMAD) ?
Ce terme regroupe les services de vidéos à la demande par abonnement, payants à l’acte ou gratuits et les services de télévision de rattrapage : Netflix, Amazon Prime Video, Disney + etc. Le décret du 22 juin est applicable tant aux SMAD relevant de la compétence de la France qu’aux SMAD étrangers visant la France.
De nouvelles obligations de financement dans la création française et européenne
Un apport majeur du décret du 22 juin 2021 est l’obligation des plateformes étrangères de vidéo à la demande visant la France de se conformer aux règles de contribution au financement de la production d’œuvres cinématographique et audiovisuelles, tout comme les services établis en France.
Les services par abonnement devront consacrer chaque année au moins 20% du chiffre d’affaires qu’ils réalisent en France, pour le développement de la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles, européennes ou d’expression originale française. Ce taux sera porté à 25% lorsqu’ils proposent annuellement un ou plusieurs films moins de douze mois après leur sortie en salles en France. La répartition de cette contribution sera fixée par la convention conclue avec le CSA sans que la part pour l’audiovisuel ou le cinéma puisse être inférieure à 20 % de la contribution totale[2].
Cette contribution pourra se matérialiser par des achats de droits d’exploitation, des investissements en parts de producteurs dans certaines conditions, le financement de travaux d’écriture et de développement, l’adaptation aux personnes en situation de handicap ou encore le financement pour le doublage, sous-titrage, promotion[3]…
Une part significative de la contribution doit soutenir la production indépendante : trois quarts de la contribution pour le développement de la production cinématographique[4] indépendante et deux tiers pour celui de la production audiovisuelle[5].
Des dispositions pour assurer une diversité parmi des œuvres financées figurent également dans le décret. En matière audiovisuelle, cette diversité est notamment assurée par genre d’œuvres[6] (fiction, animation, documentaire de création etc.[7]).
Ce décret continue de faire réagir les géants américains mais également la Commission européenne. En effet, cette dernière avait émis plusieurs réserves sur le décret SMAD dans un avis rendu le 19 mars. Les plateformes conservent aussi la possibilité d’introduire des recours contre le décret, en mettant en avant les observations qu’elles avaient formulées à la Commission. Netflix avait notamment demandé que ses productions bénéficient des aides du CNC et du crédit d’impôt.
Les évènements à venir dans les prochains jours comme les négociations actuelles sur la chronologie des médias ou le traitement que réservera le CNC aux programmes financés par les plateformes américaines seront déterminant.
Notre équipe de droit de l’audiovisuel et droit des médias conduit un travail d’analyse approfondie des détails de la réforme : droits des producteurs et des télédiffuseurs sur les productions et coproductions, incidence du Brexit, etc. Nous préparons pour nos clients et amis notre analyse de chaque aspect du « Big Bang audiovisuel ».
Décret n° 2021-793 du 22 juin 2021 « SMAD »
Source
[2] Article 14 du décret n° 2021-793 du 22 juin 2021
[3] Article 12 du décret n° 2021-793 du 22 juin 2021
[4] Article 21 du décret n° 2021-793 du 22 juin 2021
[5] Article 22 du décret n° 2021-793 du 22 juin 2021
[6] Article 18 du décret n° 2021-793 du 22 juin 2021
[7] Voire par ex. article 16 du décret n° 2021-793 du 22 juin 2021