Le Tribunal de grande instance de Paris autorise la vente de masques Hopis
Par ordonnance de référé du 12 avril 2013, Madame le Président du Tribunal de grande instance de Paris a refusé de suspendre la vente aux enchères intitulée «Collection Les masques katsinam des indiens Hopis de l’Arizona» devant se tenir le même jour à 14 H 30 à l’hôtel Drouot.
Le juge des référés était saisi par l’association Survival international France laquelle exposait que les membres de la tribu des Hopis -tribu appartenant au groupe amérindien des Pueblos d’Amérique du Nord et regroupant 18.000 membres vivant en Arizona- considèrent que les esprits nommés Katsinam sont incarnés par les masques en cause, appelés « masques katsinam », utilisés lors de cérémonies sacrées qui appartiennent à la tribu qui en est collectivement propriétaire. L’association Survival France qui bénéficiait du soutien moral et logistique du département d’Etat américain faisait en particulier valoir que les masques en question sont considérés par les Hopis comme des vecteurs par lesquels les esprits des anciens communiquent avec les vivants et que leur vente est interdite par la Constitution de la tribu Hopi de 1936.
Après avoir rejeté la fin de non-recevoir qui était opposée par la société de ventes volontaires défenderesse à l’instance, le juge des référés a estimé toutefois que le dommage imminent allégué, dommage imminent censé justifier son intervention sur le fondement de l’article 809 alinéa 1 du Code de procédure civile, n’était pas établi.
Rappelant qu’une association peut agir en justice pour défendre les intérêts collectifs rentrant dans son objet social, la Présidente du Tribunal de grande instance de Paris relève que l’association Survival France se donne pour but d’aider les peuples indigènes minoritaires dans le monde entier à exercer leurs droits à la survie et â l’autodétermination et d’assurer que leurs intérêts soient convenablement pris en compte dans toute décision pouvant affecter leur avenir, le Juge des référés a déclaré Survival International France recevable à agir. Le juge des référés en déduit que « l’action de cette association en tant qu’elle s’appuie sur l’affirmation selon laquelle les objets proposés lors de la vente en cause constituent pour les personnes de la Tribu Hopi des biens nécessaires à l’expression de leur croyance leur permettant de communiquer avec leurs ancêtres, pour solliciter une mesure provisoire doit être déclarée recevable. »
Sur le fond, le juge des référés observe en revanche que ni l’American Indian Religions Freedom Act du 11 août 1978 », ni la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones adoptée par l’Assemblée générale le 13 septembre 2007 ne pouvaient constituer le fondement juridique pertinent d’une demande tendant à la suspension de la vente et que la demanderesse ne démontrait donc pas la violation manifeste d’une loi applicable ou d’un principe général admis en droit positif.
Tout en admettant que « les masques en cause ont, pour les personnes se déclarant de la Tribu Hopi ou pratiquant la religion traditionnelle à laquelle ils se rattachent, une valeur sacrée, une nature religieuse ou s’ils incarnent l’esprit des ancêtres de ces personnes », le juge des référés relève néanmoins « qu’ils ne peuvent être assimilés à des corps humains ou à des éléments du corps de personnes existant ou ayant existé, susceptibles d’être protégés sur le fondement des principes généraux admis en droit positif et visés à l’article 16-1 du code civil. Le seul fait que ces objets puissent être qualifiés d’objets de culte, de symboles d’une foi ou de représentations divines ou sacrées ne saurait leur conférer un caractère de biens incessibles de sorte que leur vente caractériserait un trouble manifestement illicite ou un dommage imminent donnan.t au président du tribunal de grande instance statuant en référé les pouvoirs prévus à l’article 809 alinéa 1 précité ».